pour Kiss
C’était un temps que l’on suppose
Un temps de gin de chocolat glacé d’âcre tabac de musique
rapide un peu trop nasale
Des gars efflanqués des filles hirondelles s’enfermaient
dans d’étroites chambres grandes ouvertes sur le ciel
Et dehors dans un creux de pluie grondait une marée de formules
Un temps de parole infinie d’amitiés orgiaques éphémères
éternelles de haines féroces volatiles
Un temps de pain d’épices et de beurre salé sans téléphone
presque sans automobiles
Immensément venté rugueux jovial hérissé de fers à béton
Pavé de douceur mièvre et d’injonctions terribles
Il y a deux fois vingt ans cela s’éployait large aisé cavalier
fourré d’hermineC’est un temps que l’on illumine
Une clé librement tournait dans nos portes
Nous avons recueilli la saison nouvelle
Ramassant pour aller plus loin cette pièce
De vent vif de vigne vierge et de lilas
En nous et sous de hautes frondaisons
Devisant sans compter projetant sans savoir courant d’ahan
La moisson s’écoulait de nos bras malhabiles
L’ombre d’une aile a passé sur notre soleilMaintenant tu es bien plus grande que moi
Mon amie de toujours que l’angoisse le deuil
N’ont pas su durcir Tu verses de la bienveillance
Sur le monde exigu qui nous est imparti
Chaque chose après toi se veut melliflue
Un grand vouloir qui n’en peut mais s’étend partout
Toi qui sais clouer le bec aux emphatiques
Je t’en défie et de si loin j’entends ton rirePour tes sixties nous voulons douceur liberté
Musique peinture et jardins élevage de vins et de chats
Nous rappelons sur toi la première harmonie
Et l’aubaine d’un pinceau de jour
Alain PRAUD
« Maintenant tu es bien plus grande que moi
Mon amie de toujours que l’angoisse le deuil
N’ont pas su durcir Tu verses de la bienveillance
Sur le monde exigu qui nous est imparti »
ça, j’aime beaucoup, même indépendamment du reste du poème, morceau isolé mais poème à part entière, si simple et si touchant pourtant.
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Intéressant de faire le rapprochement avec le (2). Celui-ci moins distancié, plus proche de la vie familière et des sensations prosaïques, moins mystérieux sans qu’on puisse dire si c’est pour l’un ou l’autre un atout ou une faiblesse. Les deux touchants, comme tous les nevermore.
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